Mauvais Sang numéro 8 / Édito : Comme dirait l’autre, sale temps pour les révolutionnaires !

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La présente période laisse en effet un goût morne dans la bouche des antiautoritaires, voyant que les offensives réactionnaires se multiplient et que la réponse d’une grande partie des aires subversives tient à coller au discours de la gauche, qui cherche comme d’habitude à maximiser ses chances d’être la prochaine à nous contrôler.
L’État, sa police et ses frontières, ici comme ailleurs, continuent machinalement de produire leurs lots de morts, de répression et de désespérés. Au Royaume-Uni, la loi qui autorise l’État à expulser tous les clandestins d’où qu’ils viennent vers le Rwanda, qui recevra lui une compensation financière, a été entérinée. Un premier homme a été envoyé à Kigali quelques jours après et le gouvernement prévoit d’en expulser 5700 déjà identifiés d’ici à la fin de l’année.
En France, en mars dernier, c’est Wanys, un jeune de 18 ans ans de la Courneuve qui est mort après avoir été percuté par une voiture de police après un refus d’obtempérer, rappelant tristement le meurtre de Nahel en juin dernier par les flics, qui avait provoqué une déferlante d’émeutes dans le pays. Quelques jours après le meurtre de Wanys, le commissariat de La Courneuve a été courageusement pris d’assaut par des révoltés. Solidarité aux interpellés de cette nuit-là. Solidarité aussi à ceux qui, en Nouvelle-Calédonie, se révoltent aujourd’hui contre l’État français, ses flics et militaires envoyés depuis la métropole et les milices de néo-colons.
Dans ce qui s’annonce comme une stratégie au long cours de l’État contre les révoltes comme celles de juin dernier ou les blocus du mouvement contre la réforme des retraites, le gouvernement a annoncé son plan appelé « Des Droits et des Devoirs » : TIG pour les mineurs, conseil de discipline en primaire, internats, évolution de la responsabilité pénale des mineurs, inscription sur Parcoursup des contestations de l’autorité de l’Ecole etc. L’objectif est clair : il faut contraindre le plus tôt possible la jeunesse à s’insérer dans le monde morne du travail, de la discipline, de la citoyenneté. Et pour cela, ne laisser échapper aucune petite sphère de liberté qui pourrait insuffler des rêves d’émancipation dans la tête des futurs « travailleurs de la Nation ». Cette volonté va de pair avec l’autre grand projet du gouvernement, celui de la mise au travail généralisé de tout un chacun grâce à la futur loi Plein Emploi, que l’État pense pouvoir promulguer tranquillement sans heurts : comment contester cette analyse ? La gauche et les aires radicales semblent tellement travaillistes et prêtes à taper sur les précaires, les rêveurs et les oisifs qu’on ne pourrait lui donner tort.
Pendant ce temps, la gauche appelle au vote dans son traditionnel cirque électoral, cette fois-ci pour les européennes, en brandissant la sempiternelle menace de l’extrême-droite. Si cette dernière, et la réaction en général, progressent dans cette société comme le montrent la banalisation de la parole xénophobe et raciste ou la montée de l’offensive anti-trans, les élections et la souveraineté démocratique n’ont jamais permis de combattre l’extrême-droite, elles pourraient même très bien lui donner le pouvoir !
Les partis ne sont pas seuls ici dans leur entreprise piégeuse : toute une partie de la gauche extra-parlementaire des syndicats aux léninistes-twitcheurs-décoloniaux en passant par les écolos invisibles, fait la voiture-balai pour la gauche en prônant l’union sacrée de la composition autour des Insoumis, qui, entre deux-trois sorties antisémites ou pro-Assad et en se faisant dans le même temps une santé sur les gazaouis dont ils n’ont sûrement pas grand-chose à foutre, rêvent même pas secrètement de gérer à leur tour ce contre quoi leurs publicitaires radicaux sont censés se battre : l’État, avec sa police, ses prisons, ses tribunaux, ses frontières, et ses services publics de mise au travail comme France Travail.
Ne nous laissons pas faire par les autoritaires de tous bords qui n’ont que les mots d’ordre, de travail, de patrie et de stratégie à la bouche. Ne nous faisons pas berner par tous ceux qui voudraient nous faire croire à des populations soutenants sagement et unanimement les décisions de leurs États, dans une vision dénuée de la complexité du monde et de ses révoltes, allant par-là dans le sens des États biens contents de voir leur récits être avalés et recrachés sans réflexion. Ne tombons pas dans les bras de ceux qui récupèrent nos colères et nos espoirs pour se faire une place au soleil, dans des ministères ou des parlements qui n’ont jamais amené d’émancipation à personne sur cette terre.
Un numéro 8 pour perfuser un peu de Mauvais Sang dans les veines de ce monde qui pue l’autorité, la nation, le travaillisme et la discipline.
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Des enfants bâtards de l’anarchisme et du communisme.