Produits Marquants Codés

Les techniques de surveillance et de répression ne cessent de se perfectionner. Depuis les miradors, l’éclairage public, le bertillonnage, le pointage, la carte d’identité, la graphologie, le polygraphe, les empreintes digitales, l’ADN, la reconnaissance de l’œil, les caméras de vidéosurveillances, les badges, la reconnaissance faciale, les détecteurs de bruits anormaux, les drones, rien n’arrête la Smart City, l’avenir de toutes les grandes métropoles si nous n’y faisons rien. Pour compléter cet arsenal répressif déjà bien étoffé, la police peut compter sur les centaines de start-ups qui travaillent dur pour trouver de nouveaux moyens de faire peur et de mater toute révolte. Une des dernières expérimentations se trouve du côté du maintien de l’ordre, mais déjà utilisée depuis plusieurs années contre les cambriolages de commerces. Les Produits Marquants Codés (PMC) sont des produits chimiques invisibles à l’œil nu, inodores, et non toxiques qui sont utilisés pour marquer des individus à un moment où il n’est pas possible de les arrêter, et de les contrôler quelques heures ou quelques semaines plus tard (suivant le type de PMC), prouvant par la trace de ce produit, visible à la lumière UV, la présence d’une personne à un endroit et à un moment. Cette technologie anticasseurs, appliquée aux manifestations, était déjà promise par le ministre de l’intérieur Christophe Castaner en mars 2019 face à l’explosion du mouvement des gilets jaunes. Bien sûr, l’Assemblée nationale précise qu’il s’agit d’un produit qui ne peut être utilisé « que sur des manifestants commettant des délits ». Etant donné le moyen, parfois les canons à eau ou les gaz lacrymogènes, cela signifie donc que les flics peuvent décider qu’une partie entière est composée de délinquants, et que l’autre non. La direction nationale de la gendarmerie précisait, en 2021, dans le rapport de l’Assemblée Nationale, que « des études sont actuellement en cours quant à l’utilisation des produits de marquage codé au rétablissement de l’ordre, via un marqueur à distance individualisant longue portée, capable de tirer des billes frangibles de PMC ». C’est certainement ce qui a été vu utilisé en mars 2022 par les gendarmes lors des manifestations dans les Deux-Sèvres contre le projet des méga-bassines, sous la forme de balles type paintball. Utilisé aussi, le même mois, en Corse durant les manifestations suite à la mort d’Yvan Colonna, sous forme de spray.
La peur de la répression fait partie de la répression. Savoir que l’on est surveillé tend à nous paralyser. Les PMC, visibles nous rappelle qu’on est dans le viseur de la police. Les marqueurs invisibles, qui ne prouvent pas un délit mais seulement la présence d’une personne à un endroit, participent aussi à la peur puisque, éventuellement, dans chaque gaz lacrymogène peut se cacher un marqueur, visiblement.
La colère qui gronde ne sera pas arrêtée par des outils techniques. L’intelligence collective d’une émeute, d’un mouvement social, peut mettre à terre tous les drones, peut percer toutes les lignes de flics, détruire tous les palais de justice, rendant ces gadgets inutilisables de fait.