Je monte, je valide

Mais qui est je ?
Je est une machine, qui parle comme si elle était moi
Mais qui suis-je ?
Je ne suis pas une machine

Alors pour exprimer cette négation, une solution :
Je ne monte pas, je ne valide pas
Mais ce faisant, je valide que si je monte, je valide, puisque pour ne pas valider je dois également ne pas monter
Je ne monte pas, je valide
Non, comment valider sans monter, ça n’a pas de sens, puisque je dois nécessairement monter pour pouvoir valider

Alors pour exprimer cette négation, une solution :
Je monte, je ne valide pas

Qu’il est terrible le train de la vie, que nous nous devons d’emprunter mais qu’il est si coûteux de payer et si coûteux de frauder.
Et où se dirige-t-il, et comment le faire dérailler, c’est encore un autre problème…

Soyons révolutionnaires

Nous croyons ici qu’aucune révolution n’existera s’il n’est des fous -des révolutionnaires- pour la porter. Plus loin encore, nous pensons qu’à l’intérieur même d’un processus révolutionnaire aucun dépassement émancipateur et anti-autoritaire ne pourra avoir lieu s’il n’est ces mêmes fous -ou d’autres- pour le provoquer et le faire.
Ceci est un parti-pris contre les idéologies de l’attente, celles qui soumettent la possibilité d’une fracture sociale et d’un dépassement à autre chose qu’à des personnes qui se révoltent. Qu’elles la soumettent à l’Histoire, à la répression, au facteur capital-travail, aux saisons, aux « peuples », au climat, etc, il s’agit toujours de faux espoirs et de résignations qui ne disent pas leurs noms.
Aucun conflit n’a jamais été simplement provoqué par la misère et l’exploitation, ils sont toujours le fait de gens qui agissent. Autrement dit, si nous ne faisons rien, rien n’existera et nous mourrons dans les poubelles de l’Histoire. Ceci fera sûrement peur aux théoriciens de l’attente, qui, se réfugiant derrière leurs idéologies messianiques ou apocalyptiques, se rassurent de l’inéluctabilité de l’effondrement du Capital et de l’État. C’est une croyance qui nous empêche de comprendre que nous devons tout faire ici et maintenant, qui empêche de comprendre que nous pouvons changer le monde. Cette pensée empêche l’espoir, le vrai, celui qui nous pousse à transformer la matérialité de nos existences. Cette idée est sans doute rendue possible par le fait que les forces révolutionnaires sont aujourd’hui faibles : incapables de s’organiser pour le dépassement des conflits et des mouvements sociaux. Pour l’instant.
Nous devons nous constituer en force, en rupture avec les Organisations, nous devons exister de manière autonome, avec tout l’espoir que nous portons, toute la fracture sociale que nous désirons et toute la puissance dont nous disposons. Nous devons sortir de la passivité, des problématiques morales et gestionnaires, du cynisme et de l’alternativisme. Pour cela, nous devons comprendre que si nous ne le faisons pas, rien n’existera, aucune révolution ne changera radicalement les choses et nous mourrons sans avoir vécu.
L’Histoire nous donne tort, nous la défions.
L’existant nous donne tort, nous le défions.
Rien n’est magie,
Rien n’est miracle,
Rien n’est évidence
ET TOUT EST POSSIBLE

Irréductibles traversées

Depuis le début de l’automne 2021, le gouvernement biélorusse a ouvert massivement l’accès à son territoire depuis des voies aériennes et légales : de nombreux visas touristiques ont été délivrés, et de nouvelles lignes aériennes, plus fréquentes – notamment depuis l’Irak, la Syrie et l’Afghanistan – ont été créées, accompagnées de campagnes de publicité. Cet afflux organisé de milliers de personnes a été encadré sur le territoire par l’armée biélorusse, s’appuyant cyniquement sur les volontés des uns et des autres d’émigrer vers l’Union Européenne pour concentrer en peu de temps une sorte de mouvement migratoire à l’assaut des frontières polonaises, lituaniennes et lettonnes. L’instrumentalisation par la Biélorussie de la force que déploient et déploieront sans cesse tous les mouvements de migration – aussi divers soient-ils – pour traverser, casser, enfreindre, faire tomber des frontières (à l’encontre de toute volonté étatique) est une riposte strictement géopolitique : la non-reconnaissance par l’UE de la réélection du président biélorusse Loukachenko et l’ensemble des sanctions économiques prononcées.
L’armée et la police polonaises ont été mobilisées en réaction sur toute la frontière de la Pologne, et l’État d’urgence a été décrété le 25 octobre. Depuis cela, personne, hormis les flics, les militaires et les riverains des localités frontalières, ne peut plus accéder à une vaste zone fortement contrôlée. Si même l’ONU ni MSF ne pouvaient, aux dernières nouvelles, y accéder, on comprend pourquoi les communications et informations sont plus maigres que jamais, un silence entourant depuis plusieurs mois ce cauchemar. Au moins 21 personnes seraient mortes dans les forêts frontalières, n’ayant pas réussi à atteindre le territoire polonais et refusant aussi d’être « raccompagnées » par l’armée polonaise jusque dans les bras de l’armée biélorusse, qui, quant à elle, a tabassé puis désormais parqué dans des hangars les reboutés de la traversée.
Le premier ministre polonais a été le premier à employer le terme militaire de « guerre hybride » impliquant des migrants utilisés comme « armes » par la Biélorussie, ce que le président du Conseil européen a poursuivi en déclarant que les Européens étaient confrontés à une « attaque hybride brutale ». C’est ce qui aura favorisé en ce début d’année 2022 la rapide commande d’un mur de béton long de 186 km en Pologne, afin de remplacer les actuelles clôtures barbelées. On n’arrête pas le progrès.
Si, en effet, il est évident que le gouvernement biélorusse a cyniquement instrumentalisé et encadré un flux de migrations dans une perspective d’offensive géopolitique, le mouvement en lui-même de passage de la frontière y est irréductible. À un certain point, la Biélorussie, et ce, comme n’importe quel État, ne fait que gérer, tenter de maîtriser un flux qui la dépasse et dont elle n’est pas le grand manitou organisateur – variation sur les mythes réduisant n’importe quel mouvement de révolte à une cause autre que la multitude de raisons de se révolter et, en l’occurrence, de vouloir quitter un endroit de la Terre. Les entrées illégales, véritables attaques contre la logique essentielle de l’État-nation (le contrôle et la maîtrise de son territoire borné) n’attendront jamais le feu vert des États (ce qui se résume souvent à attendre qu’il soit dans l’intérêt économique de certains exploiteurs d’embaucher des bras, triés et surveillés selon les critères mêmes du besoin d’exploitation).
Contre les projections étatiques (réduire des humains à des logiques d’État), les projections fascistes (voir la preuve d’un grand remplacement offensif) et les projections humanitaires (construire l’image du migrant victime, pantin des logiques d’État) qui ont en commun de parler la confusion, toute perspective sincèrement révolutionnaire sait combien son destin internationaliste est profondément lié aux révoltes multiples et permanentes contre l’existence de frontières.
Tant que des États se trouveront en travers de notre chemin, il faudra bien que nos pas de géants les envoient valdinguer loin, loin, loin dans l’univers jusqu’à ce qu’ils disparaissent à jamais de toute la surface de la Terre !

Politesse Buro

On observe, ces derniers temps, lorsqu’un conflit éclate dans les milieux militants, que la focalisation se fait principalement sur le comportement des uns et des autres, et moins sur la confrontation entre les différentes idées qui se joue à l’occasion. La question est bien plus souvent comment s’est « comportée » telle ou telle personne, quelle impression ce comportement a fait aux participants et aux observateurs de la dite « embrouille ». À partir de cela, il devient souvent difficile de comprendre les désaccords pour ce qu’ils sont le plus souvent : des désaccords de fond. On reste en surface, par souci d’un certain confort, et on trace une limite entre les comportements acceptables et ceux qui ne le sont pas.
Mais un problème se pose alors, que l’on pourrait se poser sous différentes formes : veut-on s’organiser plutôt avec des personnes bien élevées ou plutôt avec celles avec qui on aurait une perspective commune ? Les comportements déterminent-ils un accord politique ? Affirmer un désaccord, est-ce fondamentalement méchant ou malveillant (ou pire, « relou ») ? Et surtout, peut-on considérer que si quelqu’un est « gentil », qu’il semble avoir un comportement « acceptable », c’est qu’au fond, on est probablement d’accord, il n’y a pas besoin de prendre la peine de creuser plus que ça ?
Parce que creuser plus que ça, c’est se risquer à découvrir un désaccord, et à devoir l’affirmer. C’est donc se risquer au conflit. Et le conflit ça fait peur, d’autant plus quand ça fait longtemps qu’on fait des choses ensemble sans se poser de questions, ça peut faire tomber de haut, en fonction de l’ampleur des désaccords.
Mais ne pas creuser plus que ça, c’est risquer bien pire. Au-delà du problème évident de se retrouver à lutter côte à côte avec des gens qui auraient des perspectives contradictoires aux nôtres, on manque avant tout la richesse des débats contradictoires, l’intérêt de ce que l’on peut penser, chacun mais aussi ensemble, et ce que l’on peut faire à partir de ces réflexions. Si le fond des débats se retrouve lissé par sa forme, alors comment pouvons-nous imaginer faire rupture avec le système que nous voulons détruire ?
La vivacité des mouvements sociaux réside dans l’accentuation de leurs conflits, de l’intérieur vers l’extérieur, et leur éternelle défaite se trouve dans leur systématique pacification.
Par quelle magie le mouvement révolutionnaire ferait-il exception à cette règle ?
À bas les bonnes manières !

Quoi d’autre

L’humanité vit depuis si longtemps
Allons-nous simplement perpétuer le vide et continuer à regarder nos pieds dans la marche penaude de l’existence, ce vieil éléphant obèse et éternellement mourant qui avance obstinément là où les courants du temps le poussent ?
N’allons-nous donc rien faire naître ?
Camarades, n’allons-nous donc rien inventer ?
N’allons-nous pas faire partie des chimistes du réel, des génies du temps, des explorateurs de l’espace ?
N’allons-nous donc rien dépasser ?
N’allons-nous pas faire partie des forces qui se soulèvent, emportant le monde dans leur tourbillon ?

Quoi d’autre.

Les prix flambent, la ville aussi

Récemment des émeutes ont éclaté au Kazakhstan, partant d’abord d’une contestation de l’augmentation du prix d’un carburant (comme on a pu en connaître ces dernières années à plusieurs endroits du monde, par exemple au Liban ou en France avec le mouvement des Gilets Jaunes) puis se généralisant dans la pratique pour prendre de sérieuses dimensions insurrectionnelles, forçant l’État à couper internet pour tenter de désorganiser le mouvement – comme au Soudan il y a peu, cela dit sans peu d’effet sur la vivacité des révoltes qui se poursuivent – et à faire intervenir l’armée russe.
Nous sommes malheureusement loin de ce soulèvement, qui semble maintenant pacifié, dans l’espace comme dans la révolte, mais nous pouvons nous en rapprocher en impulsant des dynamiques collectives où nous le pouvons. Un texte a été traduit sur le site CrimethInc., et des initiatives publiques seraient souhaitables, pour ce mouvement comme pour les prochain, car la révolution ne doit surtout pas connaître de frontières, et que localement nous n’irons pas bien loin.
Solidarité avec les émeutes d’hier et face à la répression de demain.